Que ça fait longtemps ! Quel bonheur de re publier quelque chose...
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Et si l'amour pouvait se trouver en prison ?
Nous sommes six en tout. Six à entrer dans le « couloir des arrivants ». On sait qu’en arrivant ici, on s’installe pour un mois. On a un mois pour s’acclimater à cet environnement. Un mois pour tenter de comprendre comment cela se passe. Mais surtout un mois à passer de nombreux entretiens.
Je vais normalement passer quatre mois ici. Mon avocat m’a fait comprendre que, pour bonne conduite, je pourrais rentrer chez moi dans deux mois. J’ai fait une bêtise, c’est sûr, mais je n’ai rien fait de grave, je n’ai tué ou blessé personne. Je ne suis pas considéré comme délinquant. Je sais aussi que je ne recommencerai pas. C’est mon premier jour dans ce couloir et je regrette déjà d’être ici. Je vais me tenir à carreaux pour sortir au plus vite de cette prison.
Les cinq autres qui arrivent en même temps que moi sont ici pour des actes bien plus grave que moi, ils sont ici pour plusieurs années.
Je patiente dans une cellule, seul. Je vais devoir leur donner mes papiers et mon téléphone. Je récupèrerai tout en sortant d’ici. En patientant, j’ai le temps de réfléchir à mes actes passés. Mais je préfère penser au futur. Il parait qu’on peut demander à participer à certaines activités. Je vais demander à pouvoir faire du sport et je vais tenter aussi une formation en langue, tant qu’à faire, autant mettre ce temps à profit. Mon avocat m’a dit que cela jouerait en ma faveur.
Une fois mon premier test passé, je suis amené dans ma cellule pour le mois… Je découvre une toute petite pièce avec deux lits, l’un au-dessus de l’autre, et une minuscule salle de bain qui comprend une toilette, une douche et un évier. Dans la pièce principale, un tout petit écran de télé, une table et deux chaises. Le temps va être long ici.
La cellule n’a pas l’air occupée pour le moment. J’espère que je ne vais pas rester seul trop longtemps, le temps paraitrait encore plus long. J’ai hâte de pouvoir sortir dans la cour. On a droit à trente minutes de balade le matin et une heure l’après-midi. Je vais avoir un peu de temps tous les jours pour apprendre à connaitre les autres détenus.
Après avoir frappé à ma porte, un policier entre dans ma cellule :
- Bonjour, t’es bien Stephane ?
- Oui.
- Je m’appelle Ali, je suis le policier en charge du couloir des arrivants. Si tu te comportes bien, on devrait bien s’entendre.
- D’accord.
- Le petit déjeuner te sera apporté à huit heures. Tu auras, tous les jours, le droit d’aller dans la cour à dix heures. Le repas est servi entre midi et midi quart. A quinze heures, dernière sortie d’une heure. Repas du soir à dix-neuf heures.
- Ok.
- Tu as le droit de cantiner.
- C’est-à-dire ?
- Que si tu as de l’argent tu peux acheter des sodas et des cigarettes.
- Super.
- Tu as un bouton près de la porte sur lequel tu peux appuyer si tu as un problème. Tu n’es pas à l’hôtel, tu n’appuies pas pour rien, compris ?
- Compris !
- Bien, à demain matin alors.
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Cela fait plus d’une semaine que je suis ici. Je commence enfin à prendre mes marques. Je suis toujours seul dans ma cellule, le temps est long.
Le jour de mon arrivée j’ai discuté un peu avec un des nouveaux. Sa bonne humeur et son sourire m’ont surpris vu le délit qu’il a commis. On a pas mal de points communs : on aime le sport, le cinéma, la musique,… J’aurais adoré partager ma cellule avec lui, on en a fait la demande, mais celle-ci a été refusée. A chaque sortie on passe notre temps ensemble. On a également accès à la salle de sport en même temps. On passe tout ce temps à discuter, on crée une vraie relation, je pense qu’on aurait pu être très proche en dehors d’ici. Malheureusement, il n’est pas près de sortir.
Pendant le premier mois, tant qu’on est dans le couloir des arrivants, on doit passer plusieurs sortes de tests, plusieurs rendez-vous. Cette semaine, c’est mon tour. Je dois rencontrer à nouveau le psychologue. Ali m’explique qu’ils doivent savoir si j’ai des envies suicidaires liées à l’incarcération, il prend le temps de bien m’expliquer les choses, j’aime beaucoup ça chez lui. Le but de cet entretien est de décider dans quelle aile de la prison je serai installé par la suite. Si j’ai bien compris, il existe deux ailes différentes. Une aile un peu plus calme, avec des personnes jugées plus faibles psychologiquement et une aile un peu plus chaude, avec des personnalités plus fortes.
En sortant de l’entretien avec le psy, je ne sais pas dans quelle aile je vais me retrouver. Je sais en tout cas que je préfèrerais être dans la plus calme des deux. Ca me rassurerait. En me reconduisant à la cellule, Ali me fait visiter un endroit que je ne connais pas encore, le réfectoire. Suite à de nombreuses bagarres qui s’y sont passées, il n’est plus utilisé que pour de rares évènements. La dernière dispute a causé la mort d’une personne et plusieurs blessés. A cause de ce triste évènement, nous sommes tous obligés de prendre nos repas dans notre cellule.
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Il y a deux jours que j’aurais dû être transféré dans une nouvelle aile. Ali ne sait pas ce qui se passe. On lui a dit que le changement a pris un peu de retard. Le retard ne concerne que mon transfert puisque les cinq détenus arrivés en même temps que moi ont été amenés dans leur cellule définitive.
Lors de notre dernière rencontre, mon avocat m’a annoncé qu’il y avait quelques soucis administratifs. Je n’ai pas eu plus de détails, mais c’est surement à cause de ça que je suis encore ici.
Je suis bien installé dans ce couloir, ça ne me dérange pas de rester encore un peu. François, l’agent qui sert les repas ce mois-ci est plus agréable que Sabine, celle qui nous déposait les repas le mois passé. François nous explique ce qui est au menu du jour et le fait en souriant. J’ai l’impression que le menu est bien meilleur quand il est livré avec un sourire. C’est aussi lui qui a poussé ma candidature pour que je puisse l’aider et me faire un peu d’argent pour pouvoir cantiner. Le temps passe plus vite quand je suis avec lui, on rigole beaucoup quand on est à deux. C’est quelqu’un de très touchant, on dirait qu’il a déjà vécu deux vies tellement il a de choses à raconter.
Si je me sens si bien ici, c’est surement parce que j’ai quelques privilèges, sans comprendre pourquoi ni grâce à qui. Il m’arrive de payer mes cigarettes moins chères. J’ai parfois deux paquets pour le prix d’un. Sans rien commander, j’ai droit à des sodas. J’ai des rations supplémentaires quand je reçois mon repas. J’ai le droit de rester plus de temps que prévu à la salle de sport.
Mon dernier rendez-vous avec mon avocat est très positif. Il m’apprend que d’ici deux semaines je pourrai sortir. Ma formation en langue a joué en ma faveur. Ma bonne conduite a confirmé l’avancée de ma date de sortie. Du coup, je passerai la fin de ma peine dans le couloir des arrivants. Ce n’est pas plus mal.
Le jour de mon départ, ayant été un détenu sympa et calme et ayant prouvé mon changement et ma motivation à me comporter correctement dehors, j’ai droit au passage de plusieurs agents pour me dire au-revoir. Tous, ils me souhaitent le meilleur. Certains agents techniques et de nettoyage sont également passés me saluer. Ils m’ont aussi ramené tous mes vêtements qui étaient au nettoyage.
Après un dernier passage chez le psychologue, et un passage rapide à l’accueil pour récupérer mes affaires déposées il y a deux mois, je suis conduis dehors et suis enfin libre.
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Arrivé chez moi, je branche mon téléphone et en allumant celui-ci, je reçois des centaines de notification. Je ne saurai jamais toutes les voir. En sortant mon portefeuille de ma poche, j’y découvre un petit mot : « Tu as été un détenu particulier pour moi. L’un des premiers. Je n’ai pas pu te le dire avant, mais dès le début tu as eu toute mon attention. J’ai essayé d’être le plus discret possible ! J’aimerais beaucoup que l’on apprenne à se connaitre. Je te laisse mon numéro, j’ai hâte de t’entendre. Ali. ».
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